
Actualité du journalisme
Informer à Gaza, le défi impossible ?
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Informer à Gaza, le défi impossible ?
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Informer à Gaza, le défi impossible ?
Depuis l’attaque terroriste du Hamas le 7 octobre 2023, Tsahal, l’armée israélienne a engagé une riposte violente à l’encontre de Gaza et d’autres territoires du Proche-Orient. Au cours de celle-ci, l’armée d’Israël s’en est massivement pris à la presse et notamment aux journalistes Palestiniens.
Dans cet article...
Les journalistes pris pour cible
Le Comité pour la Protection du Journalisme (CPJ) a recensé le nombre d’atteintes commises à l’encontre des professionnels de l’information : 137 journalistes et professionnels des médias ont été tués.
47 journalistes auraient été blessés
2 journalistes portés disparus
71 journalistes auraient été arrêté
(chiffres du 11 novembre 2024)
Ces chiffres recouvrent uniquement les cas prouvés, ils sous-estiment probablement la réalité.
Des dommages collatéraux ou des victimes volontaires ?
Même si certaines de ces victimes peuvent être qualifiées de « dommage collatéraux involontaires », Le Monde démontrait dès le 18 août 2024, grâce aux images de l’AFP, que des chars israéliens visaient délibérément des appartements où était présent du matériel d’enregistrement. Tsahal avait pourtant été informé de la présence des journalistes.
Les journalistes palestiniens particulièrement visés
La majorité des journalistes tués sont Palestiniens, avec 129 morts sur les 137. Pour cause, aucun journaliste étranger n’a pu obtenir d’autorisation pour entrer à Gaza. Selon Agence Media Palestine et RFI, Israël s’y refuse pour ne pas mettre « en péril les forces en action sur le terrain et la sécurité des soldats ».
Les reporters palestiniens ont reçu le soutien de nombreux acteurs : Reporter sans Frontière dès octobre 2023, mais aussi l’AFP, l’AP, Reuters, le New York Times, la BBC, ou encore Der Spiegel en mars 2024.
Pourtant, le blocus continue et l’armée d’Israël menace désormais des journalistes en les nommant directement. Les Palestiniens travaillant pour la chaîne qatarie Al-Jazira, l’une des rares qui parviennent à documenter la guerre sur place, sont particulièrement ciblés. C’est par exemple le cas d’Anas Al-Sharif, ou d’Hossam Shabat, deux personnes fréquemment visibles à l’antenne
Que dit le droit international ?
Le droit interdit formellement de s’en prendre aux journalistes. Deux textes principaux régissent les conflits internationaux : Le Statut de Rome, fondement de la Cour Pénale Internationale (CPI)
La Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre
Le Statut de Rome
Le statut de Rome définit comme crime de guerre « le fait de diriger intentionnellement des attaques contre la population civile en tant que telle ou contre des personnes civiles qui ne participent pas directement aux hostilités. »
La Convention de Genève
La Convention de Genève quant à elle interdit « les atteintes portées à la vie et à l’intégrité corporelle » de toutes « les personnes qui ne participent pas directement aux hostilités. »
La Cour Pénale Internationale
Une enquête de la Cour Pénale internationale a été ouverte à l’encontre de Benyamin Netanyahu. Cependant, rappelons qu’Israël a signé le Statut de Rome, mais ne l’a pas ratifié. En outre, la crédibilité de la Cour Pénale internationale est grandement remise en cause depuis que Vladimir Poutine s’est rendu en Mongolie sans être inquiété malgré le mandat d’arrêt qu’elle avait émis à son encontre. L’application de la Convention de Genève relève quant à elle du bon vouloir des États ou de pression de l’ONU. Israël n’est donc pas tenu de respecter ces deux textes.
Comment informer malgré tout ?
Les médias sont donc en grande difficulté pour mener à bien leurs missions. Deux stratégies ressortent pour l’accomplir malgré tout. Les correspondants sur place
L’OSINT
Les correspondants palestiniens
Malgré la mort de nombreux journalistes à Gaza, il en reste un certain nombre dans l’enclave. Ceux-ci diffusent sans relâche des images qui sont reprises par de nombreux médias. Par exemple, M6 a diffusé en septembre dernier « Enfer à Gaza : des vies en enfer », un reportage tourné sur place par Shrouq Aila.
L'OSINT
L’Open Source Intelligence, ou OSINT, correspond à l’ensemble des techniques permettant d’obtenir des informations à partir de sources ouvertes via des outils numériques. Analyse de l’angle de la caméra, de la position du soleil, de la trajectoire d’une bombe, mais aussi des métadonnées d’une vidéo, d’images satellites de google earth ou de bases de données de cimetières, tout est bon à prendre tant que cela permet de produire des informations fiables à partir de photos, vidéos, ou tout autre document numérique. Évidemment, la diffusion massive d’images sur les réseaux sociaux facilite ce travail. L’enquête vidéo du Monde mentionné plus tôt est un excellent exemple de cette méthode.
Des exemples
L’OSINT et le recours aux journalistes palestiniens sont complémentaires. C’est, par exemple, ce que propose Forbidden Stories dont la mission est de poursuivre les investigations de journalistes tués. Dans The Gaza Project, l’association a réuni 13 médias internationaux pour travailler sur la situation dans l’enclave. Pour ce faire, ils ont mis en communs leurs sources sur place et ont mené des enquêtes OSINT pour terminer le travail de leurs confrères.
Conclusion
Des solutions existent donc, ce qui explique que nous parvenions à être tenus au courant. Pour autant, compte tenu de la complexité du processus d’OSINT et du peu de journalistes présents sur place, il est probable que certains pans de la situation nous échappent complètement. Les récentes annonces d’Israël concernant les journalistes gazaouis devraient encore amoindrir leur capacité d’information.
Maxime

